Un accès aux soins plus difficile en raison du réchauffement climatique
Les nouveaux bras de la rivière créés par le barrage-réservoir de la Mapé favorisent non seulement la propagation de maladies tropicales négligées, telles que la schistosomiase (maladie parasitaire qui se propage par contact avec de l’eau douce contaminée), mais aggravent également l’isolement géographique des plus démunis. Sans compter les routes, qui sont à peine praticables pendant la saison des pluies, de mai à septembre.
C’est pourquoi de nombreuses personnes ne parviennent à se rendre au dispensaire ou à l’hôpital le plus proche dans un délai raisonnable. Et pour celles qui y arrivent, le trajet se fait généralement à grands frais, ce qui aggrave encore leur détresse financière. Seuls les villages situés à proximité immédiate du barrage-réservoir sont alimentés en électricité, et rares sont les habitants qui possèdent un téléphone portable. De même, la plupart des dispensaires et l’hôpital de district ne sont pas alimentés en électricité ni eau courante.
L’aide FAIRMED
En collaboration avec les autorités sanitaires, FAIRMED forme des auxiliaires de santé qui se rendent régulièrement dans les villages isolés afin de dépister les maladies, de soigner les patients et d’organiser le transport des malades qui le nécessitent.
Discrimination des indigènes Bedzan dans l’accès aux soins
Comme l’explique Marcel Ngigwe (à gauche), indigène Medzan de 45 ans vivant dans le camp de Nayanka : « Mieux vaut ne pas aller au dispensaire quand on est malade parce qu’on y est très mal traité ». Les Bedzan, comme les Baka, sont les plus anciennes populations autochtones du Cameroun. Aujourd’hui encore, elles sont opprimées, défavorisées et victimes d’exploitation. « Nos femmes accouchent ici, au village, et ne peuvent donc pas recevoir d’acte de naissance ni demander de carte d’identité pour leurs enfants, e qui empêche ces derniers d’être scolarisés », ajoute Marcel.
Les diarrhées et la gale sont particulièrement répandues dans le camp de Nayanka car, comme il l’explique : « Le seul puits d’eau potable que nous avons est hors d’usage. Alors nous devons aller chercher de l’eau dans la forêt, dans la flaque où nous faisons notre toilette et lavons nos vêtements ».
L’aide FAIRMED
En collaboration avec les autorités sanitaires locales, les auxiliaires de santé FAIRMED sensibilisent les Bedzan à l’importance de respecter certaines règles d’hygiène, et leur apprennent comment améliorer la qualité de l’eau potable. De plus, ils assistent les femmes Bedzan et veillent à ce qu’elles bénéficient d’une assistance médicale avant, pendant et après l’accouchement.
Comment les maladies appauvrissent encore les plus démunis
Ali Abakoura, 57 ans, habitant du village de Matta Barrage, est atteint d’un ulcère de Buruli, maladie bactérienne contagieuse qui provoque de graves lésions de la peau et des tissus et qui, si elle n’est pas soignée, peut entraîner la perte de la vue, de l’usage des membres et de la fonction nerveuse. Chez Ali Abakoura, l’ulcère est déjà si avancé qu’il a perdu l’usage de son bras droit et de sa jambe gauche. « Je ne peux plus travailler, et pour aller aux toilettes, j’ai besoin que mes frères me soutiennent des deux côtés », raconte Ali.
« Pour nourrir mes enfants, je dépends de l’aide de mes proches. J’ai dû puiser dans mes économies pour financer mes soins contre l’ulcère de Buruli. L’hospitalisation m’a coûté 350 000 francs CFA (environ 520 francs suisses). Depuis que l’ulcère est réapparu, je n’ai presque plus d’argent, je n’ai pas assez pour me rendre à l’hôpital de Bankim, qui se trouve à 25 kilomètres. » Tous les deux jours, Ali doit se rendre au dispensaire voisin pour y faire soigner ses plaies, ce qui lui revient à 8400 francs CFA (environ 12 francs suisses) par mois. « Je n’ai pas les moyens pour tous ces soins. Je donnerais tout pour retrouver la santé et pouvoir à nouveau pêcher pour gagner de l’argent et subvenir aux besoins de ma famille ! »
L’aide FAIRMED
En collaboration avec les autorités sanitaires locales, FAIRMED veille à ce que le transport et les soins dispensés aux personnes vivant dans la pauvreté soient gratuits.
Tout perdu sauf la vie : les réfugiés venus de l’ouest anglophone
« Mes six enfants sont régulièrement renvoyés de l’école parce que je ne peux pas payer les frais », raconte Caroline, 34 ans, habitante du village de Magba. Caroline fait partie des nombreuses personnes déplacées à l’intérieur du pays qui ont fui la guerre dans l’ouest anglophone du Cameroun. « Mon mari et moi avons fui avec nos enfants il y a six mois, quand notre village a été incendié. On s’en est sortis de justesse. »
Depuis, le mari de Caroline est parti s’installer dans une ville lointaine pour gagner plus. Caroline doit désormais assumer les rôles de mère et de père, et tenter de subvenir aux besoins de ses six enfants en tant que couturière. Mais le fait d’être réfugiée et nouvellement arrivée dans le village ne lui facilite pas la tâche. « Les gens ne me croient pas quand je leur dis que je suis une couturière qualifiée, alors ils me paient mal. Je gagne environ 5000 francs CFA (environ 7.40 francs suisses) par mois. Un revenu qui ne permet pas de nous nourrir correctement. Et quand l’un de nous tombe malade, on n’a pas les moyens de se soigner. »
L’aide FAIRMED
En collaboration avec les autorités sanitaires locales, FAIRMED veille à ce que les nombreux réfugiés venus de l’ouest bénéficient de soins médicaux gratuits, et les aide à trouver un emploi.
Bertine, l’une des quarante auxiliaires de santé formés
Nous retrouvons Bertine Moundie, auxiliaire de santé, dans le village de Gah, à environ 70 kilomètres de Magba. « C’est à la naissance de mon fils que j’ai ressenti le besoin de m’impliquer pour la santé des habitants de mon village », raconte Bertine. « J’étais en plein travail quand j’ai entendu le médecin se plaindre qu’il y ait des femmes comme moi qui ne fassent pas le moindre suivi de grossesse et que ces complications ne seraient pas survenues si je m’étais rendue plus tôt au centre de santé. » Depuis, Bertine, qui vit de l’agriculture avec son mari, a été formée par FAIRMED au métier d’auxiliaire de santé aux côtés de 39 hommes et femmes. Et voilà précisément six mois qu’elle se déplace quatre jours par semaine dans un rayon de quatre kilomètres pour dispenser des soins aux habitants de son village et des villages voisins. « Ces jours-là, je quitte ma maison à six heures du matin pour arriver à temps chez les patients qui doivent aller travailler. Quand nous menons des campagnes de vaccination infantile dans les villages, la charge de travail est si importante que je dois mettre de côté mon métier d’agricultrice pour sauver des vies. » La mission de Bertine est d’inciter les femmes à se faire suivre durant leur grossesse et à l’accouchement. « Je peux contribuer activement à réduire la mortalité maternelle et infantile. » Mais il reste beaucoup à faire. Durant notre visite dans le village de Gah, nous rencontrons un homme âgé qui présente des blessures et se plaint de douleurs aux pieds.
Comme beaucoup de villageois préfèrent ne pas parler de leurs problèmes de santé par peur des stigmatisations, Bertine accompagne l’homme jusqu’à sa maison et lui explique calmement qu’il va recevoir une aide médicale : « La semaine prochaine, le directeur du centre de santé de Gah et moi-même allons procéder à un dépistage des maladies de peau. Nous saurons alors ce qui te cause ces douleurs. Nous te remettrons des médicaments et, si nécessaire, nous soignerons tes plaies, le tout gratuitement ». Bertine, dont la valise contient des analgésiques, du désinfectant et des pansements, prend en charge le vieil homme, que l’on sent à la fois soulagé et ravi. « Je travaille pour FAIRMED, la seule ONG présente dans la région », explique Bertine en partant. « Nous veillons à ce que tu reçoives les soins nécessaires pour retrouver la santé sans avoir à débourser le moindre centime ! » Par la suite, alors que nous nous disons au revoir, elle ajoute : « Je suis très heureuse de pouvoir soigner mes voisins en tant qu’auxiliaire de santé. Plus je vais au contact des autres, plus j’apprends, et chaque fois, ma motivation grandit ! »
Personne ne doit souffrir ou mourir d’une maladie curable
Mou Ferdinand • Responsable pays Cameroun
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